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Ordonnance d'Henri III pour l'établissement d'un Hôtel des monnaies à Amiens
1577, 28 septembre
Receuil des monuments inédits de l'histoire du Tiers Etat
Première série. Région du Nord. Tome deuxième. Paris, 1853, p. 894-897
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Henry, par la
grâce de Dieu, roy de France et de Poloigne, à noz amez et féaulx
conseillers les trésoriers de France et généraulx de nos finances en la
province de Picardie establis à Amiens, et aux mayeur et eschevins de
nostredicte ville d'Amiens, salut. Comme, pour remplir nostre royaume
de monnoys à nos coing et armes et en chasser les étrangères qui
jusqu'icy ont esté l'une des principales causes de la surhaulce
excessive et desrèglement desdites monnoys, il soit très nécessaire
d'ordonner nombre suffisanz de maisons et hostels pour fabricquer
nosdictes monnoys, spécialement ès lieux les plus desréglez au cours
d'icelles, et qui, pour estre frontières et proches voisins de
l'estranger, sont plus facillement remplis de leur monnoys qu'ilz
taschent, afin de moings paier, de tousjours surhaulcer en prix, ce qui
tourne à la grande ruine de nos subjectz, et pour ceste cause nostre
très-honoré seigneur et frère le roy dernier déceddé, par son
ordonnance du XVII octobre 1571, auroit ordonné et estably en
nostredicte ville d'Amiens, comme principale et capitale de nostredit
pays de Picardie, une maison et hostel pour y estre de là en avant
fabricquées lesdictes monnoies d'or, d'argent et billon à nos coings et
armes, suivant laquelle ordonnance et en approuvant ledict
establissement et ouverture de ladite monnoye en nostredicte ville
d'Amiens, nous aurions, par autre nostre ordonnance du dernier jour de
may 1575, enjoinct aux maieur et eschevins d'icelle qui estoient de ce
temps-là de trouver hostel propre et commode pour l'assiette de ladicte
monnoye, et nommer gens de la qualité requise pour y exercer les
offices nécessaires, suivant nos ecditz et ordonnances, et à ceste fin
mesme auroient esté envoyés jusques sur les lieux noz depputez à grandz
fraiz sans toutesfois que pour cela ladite ouverture et establissement
de monnoye ait esté faict suivant nostre vouloir et intention ; ains,
les choses tournant en longueur par la négligence de ceulx qui se
pouvoient employer pour nostre service et le bien du publicq, sont
demourez jusques à présent sans exécution, à quoy désirans pourveoir
pour l'utilité commune de tous nos subjects, nous vous mandons que,
conformément à nosdictes ordonnances, nostredict vouloir et intention
est de promptement exécuter et mettre à effect ledict establissement et
ouverture de ladicte monnoye en nostredicte ville d'Amiens, pour,
suivant nostre ecdict du présent moys de septembre faict pour le
reiglement général de nos monnoyes, y estre doresnavant fabriquées
nosdictes monnoyes d'or et d'argent, et celle de billon estrangères
courantes par tout ledict pays de Picardye fondue et converties à nos
coings et armes, avec tout le soulagement de nostre peuple que polrons,
ainsi que vous apprendrez par nos commissaires que à ceste fin nous
avons depputez ; pour ce est-il que nous voullons et ordonnons
incontinant et sans délay n'y plus user de remise, vous advisiez
ensemblement de trouver hostel propre et commode pour ladicte assiette
de monnoye en ladicte ville d'Amiens, du louaige duquel hostel vous
ferez prix et bail pour nous, mandans à vous, trésoriers de France et
généraulx de noz finances, de faire doresnavant et par chascun an paier
ce que montera le louaige de ladicte maison et hostel sur les deniers
de nostredicte recepte générale d'Amiens, employant à ceste fin ledict
paiement, avec les autres charges ordinaires de ladicte recepte, et
d'autant que, pour accomoder ladicte maison et la rendre plus propre à
la fabrication desdictes monnoyes, il sera besoing d'y faire et
construire des fourneaux, fonderies, ouvreries et monnoyeries, selon
qu'il sera advisé par lesdicts commissaires que nous entendons envoier
en brief sur les lieux, à ceste cause vous ferez fondz en ladicte
recepte pour fournir et payer lesdits frais par le receveur général de
noz finances audict Amiens, selon les prix et marchez qui en seront par
vous et lesdicts commissaires arrestez au meilleur marché et mesnaige
que faire se polra, lesquelz seront passez et allouez en la despense
dudict receveur général, en rapportant par lui lesdicts prix et marchez
aisi faict, avecq les quicttances des parties prenantes tant seulement
; à trouver lequel hostel et à en faire ledict bail vous vacquerez
incessament et toutes choses laissées, et nous avertirez incontinent de
ce que en aurez faict, afin de pourveoir par nous à ce qui restera pour
ce garder ; et par mesme moyen vous, maieur et eschevins de nostredicte
ville d'Amiens, vous nommerez personnes suffisantes et de probité
requise pour, suivant noz ordonnances, exercer les offices ordinaires
et qui seront par nous establis en ladicte monnoye, à sçavoir deux de
garde, une d'essayeur, une de tailleur et une de contre-garde, et
lesquelz nous pourvoyrrons gratuitement à vostre nomination en la forme
accoustumée, et joyront des gaiges et privilèges ordonnez aux autres
senblables officiers de noz monnoyes par tout nostredict royaume, et en
tout ferez en sorte que par vostre faulte et négligence ledict
establissement ne soit retardé, ce qui tourneroit à nostre grand
préjudice et de nostre peuple. De ce faire vous donnons pouvoir,
mandement, auctorité et puissance, et mandons à tous nos justiciers et
officiers vous obéyr en ce et en tout ce qui en dépend, car tel est
nostre plaisir. En tesmoing de quoy nous avons signé ces présentes de
nostre main et à icelles faict apposer nostre seel. Donné à Poictiers,
le 28e jour de septembre, l'an de grâce 1577 et de nostre règne le 4e.
Ainsi signé, HENRY ; et plus bas, par le roy estant en son conseil,
PINART ; et scellé d'un grand sceau de cire jaulne où est emprins
l'effigie d'un roy assis en sa majesté.
Arch. de l'hôtel de ville d'Amiens, reg. aux chartes coté P, fol. 91r° et v° et 92r° |